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value |
|---|---|---|
POLOS
Oui
| ||
SOCRATE
Donc l’injustice, l’intempérance et en général la méchanceté de l’âme sont
les plus grands maux du monde ?
POLOS
Il y a apparence
| ||
SOCRATE
XXXIV
| ||
– Maintenant quel est l’art qui nous délivre de la pauvreté ? N’est-ce pas
l’économie ?
POLOS
Si
| ||
SOCRATE
Et de la maladie ? N’est-ce pas la médecine ?
POLOS
Incontestablement
| ||
SOCRATE
Et de la méchanceté et de l’injustice ? Si ma question ainsi posée
t’embarrasse, reprenons-la de cette manière : où et chez qui conduisons-nous
ceux dont le corps est malade ?
POLOS
Chez les médecins, Socrate
| ||
SOCRATE
Et où conduit-on ceux qui s’abandonnent à l’injustice et à l’intempérance ?
POLOS
Tu veux dire qu’on les conduit devant les juges ?
SOCRATE
Pour y payer leurs fautes, n’est-ce pas ?
POLOS
Oui
| ||
SOCRATE
Et maintenant n’est-ce pas en appliquant une certaine justice que l’on
punit, quand on punit avec raison ?
POLOS
Évidemment si
| ||
SOCRATE
Ainsi donc l’économie délivre de l’indigence, la médecine de la maladie,
la justice de l’intempérance et de l’injustice
| ||
POLOS
Il y a apparence
| ||
SOCRATE
Et laquelle de ces choses dont tu parles est la plus belle ?
POLOS
Quelles choses ?
SOCRATE
L’économie, la médecine, la justice
| ||
POLOS
La plus belle de beaucoup, Socrate, c’est la justice
| ||
SOCRATE
C’est donc elle aussi, puisqu’elle est la plus belle, qui procure le plus de
plaisir ou de profit ou des deux à la fois
| ||
POLOS
Oui
| ||
SOCRATE
Est-ce une chose agréable d’être entre les mains des médecins, et prend-on
plaisir à se laisser traiter par eux ?
POLOS
Je ne le crois pas
| ||
SOCRATE
Mais on y a profit, n’est-ce pas ?
POLOS
Oui
| ||
SOCRATE
Car on est délivré d’un grand mal, et l’on a avantage à supporter la douleur
et à recouvrer la santé
| ||
POLOS
Sans doute
| ||
SOCRATE
Dans ces conditions, quand est-ce qu’on est dans la meilleure condition
physique, lorsqu’on est entre les mains des médecins, ou lorsqu’on n’est pas
du tout malade ?
POLOS
C’est évidemment quand on n’a aucune maladie
| ||
SOCRATE
C’est qu’en effet le bonheur ne consiste pas, semble-t-il, à être délivré
d’un mal, mais à n’en pas avoir du tout
| ||
POLOS
C’est vrai
| ||
SOCRATE
Et de deux hommes dont le corps ou l’âme sont atteints par le mal lequel
est le plus malheureux, celui qu’on traite et qu’on délivre de son mal, ou celui
qui n’est point traité et qui le garde ?
POLOS
Il me semble que c’est celui qui n’est point traité
| ||
SOCRATE
N’avons-nous pas dit que payer sa faute, c’était se délivrer du plus grand
mal, la méchanceté ?
POLOS
Nous l’avons dit en effet
| ||
SOCRATE
C’est qu’en effet la punition assagit et rend plus juste, et que la justice est
comme la médecine de la méchanceté
| ||
POLOS
Oui
| ||
SOCRATE
Le plus heureux par conséquent est celui qui n’a point de vice dans l’âme,
puisque nous avons vu que c’était le plus grand des maux
| ||
POLOS
Sans aucun doute
| ||
SOCRATE
Au second rang vient celui qu’on délivre du vice
| ||
POLOS
Il semble
| ||
SOCRATE
Et celui-là, c’est l’homme qu’on avertit, qu’on réprimande et qui paye sa
faute ?
POLOS
Oui
| ||
SOCRATE
L’homme qui mène la vie la plus malheureuse est donc celui qui garde son
injustice, au lieu de s’en débarrasser
| ||
POLOS
C’est évident
| ||
SOCRATE
Or n’est-ce pas justement le cas de l’homme qui, tout en commettant les
plus grands crimes et tenant la conduite la plus injuste, réussit à se mettre au-
dessus des avertissements, des corrections, des punitions, comme l’a fait, dis-
tu, Archélaos, ainsi que les autres tyrans, les orateurs et les potentats ?
POLOS
Il le semble
| ||
SOCRATE
XXXV
| ||
– Ces gens-là, excellent Polos, se sont à peu près conduits comme un
homme qui, atteint des plus graves maladies, se serait arrangé pour ne point
rendre compte aux médecins de ses tares physiques et pour échapper à leur
traitement, craignant, comme un enfant, qu’on ne lui appliquât le feu et le fer,
parce que cela fait mal
| ||
N’est-ce pas ainsi que tu te figures leur état ?
POLOS
Si
| ||
SOCRATE
La raison, c’est qu’il ignorerait, ce semble, le prix de la santé et du bon
état du corps
| ||
À en juger par les principes sur lesquels nous sommes à présent
d’accord, ceux qui cherchent à éviter la punition ont bien l’air de se conduire
de la même manière, Polos
| ||
Ils voient ce qu’elle a de douloureux, mais ils
sont aveugles sur ce qu’elle a d’utile et ils ne savent pas combien on est plus
à plaindre d’habiter avec une âme malsaine, gâtée, injuste, impie, qu’avec un
corps malsain
| ||
De là vient qu’ils mettent tout en œuvre pour ne point expier
leur faute et n’être pas délivrés du plus grand des maux ; ils tâchent de se
procurer des richesses et des amis et d’être aussi habiles que possible à
persuader au moyen du discours
| ||
Mais si nos principes sont justes, vois-tu ce
qui résulte de notre discussion, ou veux-tu que nous en tirions les
conclusions ?
POLOS
Oui, s’il te plaît
| ||
SOCRATE
N’en résulte-t-il pas que le plus grand des maux, c’est d’être injuste et de
vivre dans l’injustice ?
POLOS
Si, évidemment
| ||
SOCRATE
D’autre part, n’avons-nous pas reconnu qu’on se délivrait de ce mal en
payant sa faute ?
POLOS
C’est possible
| ||
SOCRATE
Et que l’impunité ne faisait que l’entretenir ?
POLOS
Oui
| ||
SOCRATE
Par conséquent, pour la grandeur du mal, commettre l’injustice n’est qu’au
second rang ; mais l’injustice impunie est le plus grand et le premier de tous
les maux
| ||
POLOS
Il semble
| ||
SOCRATE
N’est-ce pas sur ce point, cher ami, que nous étions en contestation ? Tu
soutenais, toi, qu’Archélaos est heureux, parce que, commettant les plus
grands crimes, il échappe à toute punition ; moi, au contraire, je pensais
qu’Archélaos ou tout autre qui ne paye point ses crimes est naturellement le
plus malheureux de tous les hommes, que celui qui commet une injustice est
toujours plus malheureux que celui qui la subit et celui qui ne paye pas sa
faute plus que celui qui l’expie
| ||
N’est-ce point là ce que je disais ?
POLOS
Si
| ||
SOCRATE
N’est-il pas démontré que j’avais la vérité pour moi ?
POLOS
Il le semble
| ||
SOCRATE
XXXVI
| ||
– Voilà qui est entendu ; mais si cela est vrai, Polos, où est donc la grande
utilité de la rhétorique ? Il faut en effet, d’après les principes sur lesquels
nous sommes à présent d’accord, se garder avant tout de commettre
l’injustice, vu que ce serait déjà un mal suffisant
| ||
N’est-ce pas vrai ?
POLOS
Tout à fait
| ||
SOCRATE
Et si l’on a commis une injustice, ou soi-même, ou toute autre personne à
qui l’on s’intéresse, il faut aller de son plein gré là où on l’expiera le plus vite
possible, chez le juge, comme on irait chez le médecin, et se hâter, de peur
que la maladie de l’injustice devenue chronique ne produise dans l’âme un
ulcère inguérissable
| ||
Autrement que pouvons-nous dire, Polos, si nos
prémisses demeurent fermes ? N’est-ce pas la seule manière d’accorder notre
conclusion avec elles ?
POLOS
Que pourrions-nous dire d’autre, Socrate ?
SOCRATE
Donc, pour nous défendre d’une accusation d’injustice, lorsque nous en
avons commis une nous-mêmes, ou nos parents, ou nos amis, ou nos enfants,
ou notre patrie, la rhétorique n’est pour nous d’aucun usage, Polos, à moins
qu’on n’admette au contraire qu’il faut s’accuser soi-même le premier, puis
ses parents et ses amis, toutes les fois qu’ils ont commis quelque injustice,
qu’il ne faut point cacher sa faute, mais l’exposer au grand jour, afin de
l’expier et de recouvrer la santé, qu’on doit se faire violence à soi-même et
aux autres pour ne pas reculer, mais pour s’offrir les yeux fermés et avec
courage, comme on s’offre au médecin pour être amputé ou cautérisé, qu’il
faut poursuivre le bon et le beau, sans tenir compte de la douleur, et, si la
faute qu’on a commise mérite des coups, aller au-devant des coups ; si elle
mérite la prison, aller au-devant des chaînes ; si elle mérite une amende, la
payer ; l’exil, s’exiler ; la mort, la subir ; être le premier à déposer contre soi-
même et contre ses proches et pratiquer la rhétorique uniquement pour se
délivrer, par la manifestation de ses crimes, du plus grand des maux,
l’injustice
| ||
Est-ce là, oui ou non, Polos, ce que nous devons dire ?
POLOS
Cela me paraît étrange, Socrate ; mais peut-être est-ce la conséquence de
ce que nous avons dit précédemment
| ||
SOCRATE
Ainsi donc, il faut, ou bien rétracter ce que nous avons dit, ou bien
admettre ces conclusions ?
POLOS
Oui, la chose est ainsi
| ||
SOCRATE
Prenons maintenant le cas contraire
| ||
Supposons qu’il faille faire du mal à
quelqu’un, ennemi ou tout autre, – pourvu qu’on ne soit pas soi-même lésé
par son ennemi, car il faut bien prendre garde à cela, – si donc c’est un autre
que cet ennemi a lésé, il faut faire tous ses efforts, en actions et en paroles,
pour qu’il ne soit pas puni et ne vienne pas devant le juge ; et, s’il y vient, il
faut s’arranger pour qu’il échappe et ne soit pas puni, de sorte que, s’il a volé
une grande quantité d’or, il ne le rende pas, mais le garde et le dépense pour
lui-même et les siens d’une manière injuste et impie, et que, s’il a mérité la
mort par ses crimes, il y échappe et, si c’est possible, qu’il ne meure jamais,
mais soit immortel dans sa méchanceté, ou que du moins il vive le plus
longtemps possible dans l’état où il est
| ||
Telles sont, Polos, les fins pour
lesquelles la rhétorique me semble pouvoir servir ; car pour celui qui ne doit
commettre aucune injustice, je ne vois pas qu’elle puisse lui être d’une
grande utilité, si tant est qu’elle en ait aucune ; car notre argumentation
précédente nous a fait voir qu’elle n’était bonne à rien
| ||
CALLICLÈS
XXXVII
| ||
– Dis-moi, Khairéphon, Socrate, est-il sérieux, quand il tient ce langage,
ou badine-t-il ?
KHAIRÉPHON
Il me semble à moi, Calliclès, qu’il est souverainement sérieux ; mais il
n’y a rien de tel que de l’interroger lui-même
| ||
CALLICLÈS
Par les dieux, j’en ai bien envie
| ||
Dis-moi, Socrate, faut-il croire que tu
parles sérieusement en ce moment, ou que tu badines ? Car, si tu parles
sérieusement et si ce que tu dis est vrai, c’est de quoi renverser notre vie
sociale, et nous faisons, ce me semble, tout le contraire de ce qu’il faudrait
| ||
SOCRATE
Si les hommes, Calliclès, n’étaient pas sujets aux mêmes passions, ceux-ci
d’une façon, ceux-là d’une autre, et que chacun de nous eût sa passion
propre, sans rapport avec celles des autres, il ne serait pas facile de faire
connaître à autrui ce qu’on éprouve soi-même
| ||
Si je dis cela, c’est que j’ai
observé que nous sommes actuellement, toi et moi, dans le même cas, et que
nous sommes tous deux épris de deux objets, moi d’Alcibiade, fils de Clinias,
et de la philosophie, toi, du Démos athénien et de Démos, fils de Pyrilampe
| ||
Or, je m’aperçois en toute occasion qu’en dépit de ton éloquence, quoi que
dise l’objet de ton amour et de quelque manière qu’il voie les choses, tu n’as
pas la force de le contredire et que tu te laisses ballotter d’une idée à l’autre
| ||
Si dans l’assemblée tu émets une opinion et que le Démos athénien se déclare
contre elle, tu l’abandonnes et tu conformes ton langage à ses désirs, et tu en
fais autant pour ce beau garçon, le fils de Pyrilampe
| ||
C’est que tu es hors
d’état de résister aux volontés et aux discours de l’objet aimé ; et si
quelqu’un, chaque fois que tu parles, s’étonnait des choses que tu dis pour
leur complaire et les trouvait absurdes, tu pourrais lui répondre, si tu voulais
dire la vérité, que, si l’on n’empêche pas tes amours de parler comme ils font,
tu ne pourras jamais t’empêcher toi-même de parler comme tu fais
| ||
Dis-toi donc que, de ma part aussi, tu dois t’attendre à la même réponse et
ne t’étonne pas des discours que je tiens, mais oblige l’objet de mon amour,
la philosophie, à cesser de parler comme elle fait
| ||
C’est elle en effet, cher
ami, qui dit sans cesse ce que tu m’entends dire en ce moment, et elle est
beaucoup moins changeante que mes autres amours ; car le fils de Clinias
parle tantôt d’une façon, tantôt d’une autre mais la philosophie tient toujours
le même discours
| ||
C’est elle qui dit les choses dont tu t’étonnes et tu as
assisté toi-même à ses discours
| ||
C’est donc elle que tu as à réfuter, je le
répète ; prouve-lui que commettre l’injustice et vivre dans l’impunité, après
l’avoir commise, n’est pas le dernier des maux
| ||
Autrement, si tu laisses cette
assertion sans la réfuter, par le chien, dieu des Égyptiens, je te jure, Calliclès,
que Calliclès ne s’accordera pas avec lui-même et qu’il vivra dans une
perpétuelle dissonance
| ||
Or, je pense, moi, excellent ami, que mieux vaudrait
pour moi avoir une lyre mal accordée et dissonante, diriger un chœur
discordant et me trouver en opposition et en contradiction avec la plupart des
hommes que d’être seul en désaccord avec moi-même et de me contredire
| ||
CALLICLÈS
XXXVIII
| ||
– Tu m’as l’air, Socrate, d’être aussi présomptueux dans tes discours qu’un
véritable orateur populaire, et tu déclames ainsi, parce que Polos a eu la
même défaillance qu’il accusait Gorgias d’avoir eue avec toi
| ||
Polos a dit en
effet que Gorgias, lorsque tu lui as demandé, au cas où quelqu’un, désireux
d’apprendre la rhétorique, viendrait à son école sans connaître la justice, s’il
la lui enseignerait, avait répondu qu’il l’enseignerait, par fausse honte et pour
ne pas heurter les préjugés des gens, qui s’indigneraient qu’on répondît
autrement ; que cet aveu avait réduit Gorgias à se contredire, et que c’est
justement cela que tu cherches
| ||
Là-dessus Polos s’est moqué de toi et à juste
titre, à mon avis
| ||
Et voilà que Polos s’est mis lui-même dans le même cas que Gorgias, et,
pour ma part, je ne saurais l’approuver de t’avoir accordé qu’il est plus laid
de commettre l’injustice que de la subir
| ||
C’est à la suite de cette concession
que tu as pu l’empêtrer dans tes raisonnements et lui fermer la bouche ; parce
qu’il n’a pas osé parler suivant sa pensée
| ||
Car au fond, Socrate, c’est toi qui,
tout en protestant que tu cherches la vérité, te comportes comme un vulgaire
déclamateur et diriges la conversation sur ce qui est beau, non selon la nature,
mais selon la loi
| ||
Or, le plus souvent, la nature et la loi s’opposent l’une à l’autre
| ||
Si donc,
par pudeur, on n’ose pas dire ce qu’on pense, on est forcé de se contredire
| ||
C’est un secret que tu as découvert, toi aussi, et tu t’en sers pour dresser des
pièges dans la dispute
| ||
Si l’on parle en se référant à la loi, tu interroges en te
référant à la nature, et si l’on parle de ce qui est dans l’ordre de la nature, tu
interroges sur ce qui est dans l’ordre de la loi
| ||
C’est ainsi, par exemple, qu’à
propos de l’injustice commise et subie, tandis que Polos parlait de ce qu’il y a
de plus laid selon la loi, tu poursuivais la discussion en te référant à la nature
| ||
Car, selon la nature, tout ce qui est plus mauvais est aussi plus laid, comme
de souffrir l’injustice, tandis que, selon la loi, c’est la commettre
| ||
Ce n’est
même pas le fait d’un homme, de subir l’injustice, c’est le fait d’un esclave,
pour qui la mort est plus avantageuse que la vie, et qui, lésé et bafoué, n’est
pas en état de se défendre, ni de défendre ceux auxquels il s’intéresse
| ||
Mais,
selon moi, les lois sont faites pour les faibles et par le grand nombre
| ||
C’est
pour eux et dans leur intérêt qu’ils les font et qu’ils distribuent les éloges ou
les blâmes ; et, pour effrayer les plus forts, ceux qui sont capables d’avoir
l’avantage sur eux, pour les empêcher de l’obtenir, ils disent qu’il est honteux
et injuste d’ambitionner plus que sa part et que c’est en cela que consiste
l’injustice, à vouloir posséder plus que les autres ; quant à eux, j’imagine
qu’ils se contentent d’être sur le pied de l’égalité avec ceux qui valent mieux
qu’eux
| ||
XXXIX
| ||
– Voilà pourquoi, dans l’ordre de la loi, on déclare injuste et laide
l’ambition d’avoir plus que le commun des hommes, et c’est ce qu’on appelle
injustice
| ||
Mais je vois que la nature elle-même proclame qu’il est juste que le
meilleur ait plus que le pire et le plus puissant que le plus faible
| ||
Elle nous
montre par mille exemples qu’il en est ainsi et que non seulement dans le
monde animal, mais encore dans le genre humain, dans les cités et les races
entières, on a jugé que la justice voulait que le plus fort commandât au moins
fort et fût mieux partagé que lui
| ||
De quel droit, en effet, Xerxès porta-t-il la
guerre en Grèce et son père en Scythie, sans parler d’une infinité d’autres
exemples du même genre qu’on pourrait citer ? Mais ces gens-là, je pense,
agissent selon la nature du droit et, par Zeus, selon la loi de la nature, mais
non peut-être selon la loi établie par les hommes
| ||
Nous formons les meilleurs
et les plus forts d’entre nous, que nous prenons en bas âge, comme des
lionceaux, pour les asservir par des enchantements et des prestiges, en leur
disant qu’il faut respecter l’égalité et que c’est en cela que consistent le beau
et le juste
| ||
Mais qu’il paraisse un homme d’une nature assez forte pour
secouer et briser ces entraves et s’en échapper, je suis sûr que, foulant aux
pieds nos écrits, nos prestiges, nos incantations et toutes les lois contraires à
la nature, il se révoltera, et que nous verrons apparaître notre maître dans cet
homme qui était notre esclave ; et alors le droit de la nature brillera dans tout
son éclat
| ||
Il me semble que Pindare met en lumière ce que j’avance dans l’ode où il
dit :
24
« La loi, reine du monde, des mortels et des immortels
| ||
» « Cette loi,
ajoute-t-il, justifiant les actes les plus violents, mène tout de sa main toute-
puissante
| ||
J’en juge par les actions d’Héraclès, puisque, sans les avoir
achetés… »
Voici à peu près son idée, car je ne sais pas l’ode par cœur ; mais le sens
est que, sans avoir acheté ni reçu en présent les bœufs de Géryon, Héraclès
les emmena, estimant que le droit naturel était pour lui et que les bœufs et
tous les biens des faibles et des petits appartiennent au meilleur et au plus
fort
|
Subsets and Splits
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